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Réflexions politiques et socio-culturelles françaises.

Le wokisme peut-il tuer la gauche qui le sert ?

Julien Bayou, Jean-Luc Mélenchon et Adrien Quatennens, hommes à abattre.

Julien Bayou, Jean-Luc Mélenchon et Adrien Quatennens, hommes à abattre.

Les dernières semaines nous l'ont montrées, le wokisme, et notamment sa composante féministe post-MeToo, est en train de sérieusement inquiéter la gauche, rassemblée depuis le printemps au sein de la NUPES, et attaquée à sa tête par des affaires de mœurs qu'on ne pensait pas revoir depuis l'affaire Denis Baupin ou l'affaire DSK... Après Taha Bouhafs et Eric Coquerel, c'est au tour d'Adrien Quatennens d'être ciblé et écarté des médias (mais pas encore de son mandat de député) pour avoir giflé sa femme. On remarquera que de tentatives de viol et d'agression sexuelle, on en est arrivé à la "simple" gifle pour justifier de démettre un élu de ses fonctions. Là où on estimait encore il y a quelques années qu'il fallait séparer ce qui relève du public du privé en matière de politique, on a passé un cap dans le voyeurisme et l'étalage de la vie privée de nos politiques à la manière des Etats-Unis, dans le but de faire chuter des têtes. Tous les coups sont permis désormais.

C'est sans doute ce qu'a voulu exprimer Mélenchon dans son tweet maladroit saluant le "courage" de Quatennens dans cette "épreuve", omettant la "victime" sa femme en instance de divorce. On saluera au passage le dévouement des médias et des réseaux sociaux pour se venger de lui en le faisant passer pour le pire des réacs. C'est le revers de la médaille. Les Insoumis payent leur volonté d'être à l'avant-garde sur ces questions avec d'autres partis de gauche (comme EELV), la lutte contre les violences faites aux femmes étant bien mise en avant dans leur programme politique. Quand certains membres de la majorité et même ministres sont accusés d'agression sexuelle ou de viol mais restent en place sans que les médias et cette majorité s'en inquiètent, une "simple" gifle mérite qu'un député de l'opposition rende son mandat sur le champ pour être cohérent avec ses idées. Les autres peuvent dormir tranquille, car eux ne donnent pas de leçons sur ce sujet. A croire que gifler sa femme est devenu aussi voire plus répréhensible que de violer ou agresser sexuellement...

L'acharnement médiatique pose en tout cas question sur la volonté politique derrière de telles méthodes. Lors de l'été, à peine Eric Coquerel était nommé à la direction des finances de l'Assemblée nationale que des accusations à son encontre sortaient du chapeau. Le timing laissait tout de même à désirer. A présent Quatennens, dont on a exploité une info qui aurait du rester du domaine du privé et qui a été utilisée sans ménagement comme une arme politique par les médias. Une arme redoutable qui ferait presque passer la droite pour des défenseurs du droit des femmes. L'arroseur arrosé, mais bien hypocrite étant celui qui renvoie le jet, donnant finalement raison au combat qui est celui de la gauche en matière de féminisme.

Et dans le même temps, ceux qui se réjouissent de ce retour de bâton à droite s'inquiètent à demi-mot du sort de ces hommes qui sont accusés sur la voie public sans possibilité de se défendre médiatiquement. Dernière victime en date : Julien Bayou, secrétaire national d'EELV, accusé à son tour (indirectement) par Sandrine Rousseau d'agression sexuelle. Le linge sale se lave en famille, si tant est qu'EELV en soit encore une. On assiste semble-t-il à un grand déballage et une sorte de Game of Thrones au sein de la NUPES, plutôt "sanglant" mais dont on ne sait pas ce qu'il en sortira pour l'avenir du mouvement.

Plus généralement, on peut se demander si les questions sociétales, de mœurs, de wokisme ou de lutte sans fin pour le féminisme ou le droit des minorités ne lui fait pas plus de mal qu'autre chose. Non pas que ces questions ne soient pas importantes, mais j'ai tendance à penser qu'elles deviennent de plus en plus le centre de gravité des luttes sociales à gauche, comme aux Etats-Unis. Bien qu'elle survive quand même à travers l'écologie, la lutte contre le capitalisme est passée semble-t-il au second plan, et n'est plus une priorité pour une certaine gauche caviar, bobo et citadine. La lutte pour l'égalité ne concerne plus les classes sociales mais les sexes ou les communautés ethniques et religieuses. Une des raisons expliquant sans doute pourquoi les classes populaires issues des "majorités" se sont éloignées de la gauche pour privilégier le nationalisme.

Quelque chose que Fabien Roussel du Parti communiste a sans doute compris, bien que ses sorties médiatiques soient loin d'être toujours pertinentes quand il s'agit de reconquérir les classes populaires (la "gauche des allocs" en témoigne...). Mais ce qui est sûr, c'est que la reconquête (pas celle d'Eric Zemmour, mais de la gauche) passera bien par la lutte des classes (bien pour ça que Zemmour, la droite et l'extrême-droite veulent la remplacer par la "préférence nationale"), plus que par les luttes féministes ou wokes de toute sorte, qui ne concerneront toujours que des minorités (les femmes n'étant bien sûr pas une minorité en soi, les féministes si), qui même rassemblées ne formeront pas une majorité. Pour que la gauche gagne et retrouve du sens collectif et non communautaire, qu'elle remette donc plus que jamais le socialisme et l'écologie en avant !

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